Décision de cour de cassation

Arrêt de cour de cassation qui vient d’être publié et qui donne gain de cause pour les 15% pour un agent enquêteur.

Le : 25/04/2014

Cour de cassation

chambre sociale

Audience publique du 12 février 2014

N° de pourvoi: 12-24463

ECLI:FR:CCASS:2014:SO00325

Non publié au bulletin

Rejet

M. Frouin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président), président

SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Orléans, 26 juin 2012), que M. X…, engagé par l’URSSAF de Touraine en mai 1974, a saisi le 13 septembre 2010 la juridiction prud’homale d’une action tendant à se voir reconnaître le droit au versement d’une prime en application de l’article 23, alinéa 3, de la convention collective nationale des organismes de sécurité sociale et à obtenir la condamnation de l’employeur à lui payer diverses sommes à titre de rappels de salaires ;

Sur le premier moyen, ci-après annexé :

Attendu qu’ayant relevé que le salarié se déplaçait auprès des usagers pour exercer ses responsabilités, notamment de conseil et d’information, la cour d’appel, qui a répondu aux conclusions, en a exactement déduit qu’il pouvait prétendre au versement de la prime prévue à l’article 23, alinéa 3, de la convention collective nationale des organismes de sécurité sociale du 8 février 1957 ; que le moyen n’est pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu que l’employeur fait grief à l’arrêt attaqué de le condamner à payer au salarié une somme à titre de dommages-intérêts pour retard dans le paiement de la rémunération, alors, selon le moyen :

1°/ que la cassation à intervenir de l’arrêt visant le chef du dispositif accordant au salarié la prime dite d’ « itinérance », entraînera, par application de l’article 624 du code de procédure civile, celles des dispositions condamnant l’employeur à verser à son salarié des dommages-intérêts pour préjudice subi du fait du déficit de rémunération subi pendant plusieurs années ;

2°/ que seul le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages-intérêts distincts des intérêts moratoires de la créance ; qu’en l’espèce, pour accorder au salarié une somme de 400 euros à titre de dommages-intérêts pour retard dans le paiement de sa rémunération, la cour d’appel s’est bornée à affirmer « le déficit de rémunération subi pendant plusieurs années est à l’origine d’un préjudice » ; qu’en se déterminant par de tels motifs impropres à caractériser ni la mauvaise foi de l’employeur, ni l’existence pour le salarié d’un préjudice indépendant du retard apporté au paiement des sommes dues par l’employeur, la cour d’appel a violé l’article 1153, alinéa 4, du code civil ;

Mais attendu, d’abord, que le rejet du premier moyen rend sans objet le premier grief du second moyen ;

Attendu, ensuite, que l’arrêt, qui fait ressortir que le salarié remplissait manifestement les conditions pour prétendre à la prime d’itinérance et relève que le déficit de rémunération subi pendant plusieurs années lui a causé un préjudice indépendant du retard apporté au paiement des sommes dues, n’encourt pas le grief du moyen ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne l’URSSAF de Touraine aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de l’URSSAF de Touraine et condamne celle-ci à payer à M. X… la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze février deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour l’URSSAF de Touraine.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à la décision attaquée d’AVOIR condamné l’URSSAF de Touraine à payer à Monsieur X… les sommes de 17.831,05 euros de rappel de salaire, 1.660,25 euros de rappel de prime et 13ème mois de septembre 2005 à septembre 2010, 1.385,20 euros de primes de vacances, 400 euros de dommages et intérêts pour retard dans le paiement de sa rémunération et 300 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile et d’AVOIR condamné l’URSSAF de Touraine aux dépens de première instance et d’appel.

AUX MOTIFS QU’« Sur les primes dites d’itinérance

L’article 23 alinéa 3 de la convention collective nationale de la sécurité sociale du 8 février 1957, applicable aux salariés de l’URSSAF, prévoit le versement au profit de l’agent technique chargé d’une fonction d’accueil d’une prime de 15% de son coefficient de qualification sans points d’expérience ni points de compétence, lorsqu’il est itinérant.

Deux conditions sont posées par le texte pour l’application de ce texte :

– occuper un emploi d’agent technique chargé d’une fonction d’accueil

– exercer ces fonctions de façon itinérante Alain X… exerce les fonctions d’enquêteur chargé des relations extérieures, coefficient 230 niveau 04S.

A ce titre il est agent technique.

Dans le référentiel d’emploi de la convention collective, les finalités de l’emploi d’enquêteur chargé des relations externes, sont : « contribuer, par la recherche, à la vérification, au conseil, à la régularisation des situations administratives ou comptables, et à l’amélioration des relations avec les cotisants et les partenaires ».

Dans le savoir-faire relationnel, il est mentionné sa capacité à :

– utiliser un langage clair et compréhensible en s’adaptant à la nature de l’interlocuteur et à sa demande

– informer le cotisant de ses obligations et de ses droits ou l’orienter vers l’interlocuteur adapté

(…)

– présenter et renseigner sur les offres nouvelles de services adaptées à la situation de l’interlocuteur.

Ce sont là autant de compétences que de qualités associées à des fonctions de conseil.

En l’occurrence, les interlocuteurs d’Alain X…, usagers de l’URSSAF, sont les employeurs auprès desquels il se rend, pour exercer ses responsabilités, parmi lesquelles celles de conseil et d’information, d’où il suit qu’il est chargé d’une fonction d’accueil, peu important le lieu d’exercice de cette fonction.

Dans la mesure où le salarié se déplace pour ce faire, il doit être considéré comme itinérant.

C’est ajouter au texte que de soutenir que l’agent d’accueil a pour fonction de conseiller le public, non seulement sur la législation de sa propre branche, mais également sur les éléments généraux des autres législation du régime général de sécurité sociale ou encore que cet accueil s’entend d’un accueil physique de cotisants qui se présenteraient en un lieu déterminé pouvant être le siège de l’unité, une antenne ou encore une permanence en mairie.

Le jugement sera infirmé en ce qu’il a dit que le salarié ne pouvait pas prétendre au versement de la prime de 15% prévue par l’article 23 alinéa 3 de la convention collective alors qu’il remplit les deux conditions posées par ce texte.

Sur les divers rappels

L’URSSAF de Touraine devra verser à Alain X…, un rappel de salaire de 17.831,05 euros du mois de septembre 2005 au mois de février 2012.

Le versement de cette prime induit un rappel de prime de 13ème mois versé chaque année en novembre, soit un rappel de 1.660,20 euros jusqu’à la date ci-dessus de même en ce qui concerne la prime de vacances versée annuellement en deux fois, en mai et septembre, pour une différence de 1.385,20 euros à revenir au salarié

Ce déficit de rémunération subi pendant plusieurs années est à l’origine d’un préjudice que la cour évalue à 400 euros.

Sur l’article 700 du Code de procédure civile

L’URSSAF qui succombe aux entiers dépens devra verser à Alain X… une indemnité de 300 euros en dédommagement des frais irrécupérables qu’il a dû exposer pour faire valoir ses droits.» ;

1°) ALORS QUE l’article 23 alinéa 3 de la convention collective nationale du personnel des organismes de sécurité sociale du 8 février 1957 prévoit que l’agent technique, chargé d’une fonction d’accueil, bénéficie d’une prime de 15% de son coefficient de qualification sans points d’expérience ni points de compétences lorsqu’il est itinérant ; que la fonction d’accueil n’est effectivement exercée que lorsque l’agent est appelé à recevoir du public se rendant spontanément dans un lieu prévu à cet effet aux fins d’obtenir des réponses à des interrogations susceptibles de porter sur toute la législation du régime général de sécurité sociale, et non lorsque l’agent se déplace pour aller lui-même à la rencontre de cotisants afin de prodiguer des conseils et de mener des actions de prévention dans le domaine limité de la législation de sa propre branche ; qu’en retenant que « c’est ajouter au texte que de soutenir que l’agent d’accueil a pour fonction de conseiller le public non seulement sur la législation de sa propre branche, mais également sur les éléments généraux des autres législations du régime général de sécurité sociale ou encore que cet accueil s’entend d’un accueil physique de cotisants qui se présenteraient en un lieu déterminé pouvant être le siège de l’unité, une antenne ou encore une permanence en mairie », pour en déduire que Monsieur X… ayant des fonctions « de conseil et d’information, d’où il s’en déduit qu’il est chargé d’une fonction d’accueil » et qu’il devait bénéficier de ladite prime, la Cour d’appel a violé l’article 23 alinéa 3 de la Convention collective nationale du personnel des organismes de sécurité sociale du 8 février 1957 ;

2°) ALORS QUE les juges du fond sont tenus de répondre aux conclusions des parties ; qu’en l’espèce, l’employeur faisait valoir que Monsieur X… exerçait des fonctions d’enquêteur, ces dernières étant fondamentalement différentes des fonctions d’accueil, et qu’il relevait conventionnellement de la catégorie du contrôle de gestion du risque tandis que les agents d’accueil appartenaient à la catégorie famille professionnelle gestion des situations de clients (conclusions d’appel p. 5 § 14-15-16 et p.6 § 1 et 2) ; que pour l’établir, étaient versés aux débats le référentiel d’emploi décrivant les fonctions d’accueil ainsi que les organigrammes de l’URSSAF TOURAINE ; qu’en s’abstenant de répondre à ce moyen, la Cour d’appel a violé l’article 455 du Code de procédure civile ;

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à la décision attaquée d’AVOIR condamné l’URSSAF de Touraine à payer à Monsieur X… les sommes de 400 euros de dommages et intérêts pour retard dans le paiement de sa rémunération et 300 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile et d’AVOIR condamné l’URSSAF de Touraine aux dépens de première instance et d’appel.

AUX MOTIFS QU’« Sur les divers rappels

L’URSSAF de Touraine devra verser à Alain X…, un rappel de salaire de 17.831,05 euros du mois de septembre 2005 au mois de février 2012.

Le versement de cette prime induit un rappel de prime de 13ème mois versé chaque année en novembre, soit un rappel de 1.660,20 euros jusqu’à la date ci-dessus de même en ce qui concerne la prime de vacances versée annuellement en deux fois, en mai et septembre, pour une différence de 1.385,20 euros à revenir au salarié

Ce déficit de rémunération subi pendant plusieurs années est à l’origine d’un préjudice que la cour évalue à 400 euros.

Sur l’article 700 du Code de procédure civile

L’URSSAF qui succombe aux entiers dépens devra verser à Alain X… une indemnité de 300 euros en dédommagement des frais irrécupérables qu’il a dû exposer pour faire valoir ses droits.» ;

3°) ALORS QUE la cassation à intervenir de l’arrêt visant le chef du dispositif accordant au salarié la prime dite d’ « itinérance », entraînera, par application de l’article 624 du Code de procédure civile, celles des dispositions condamnant l’employeur à verser à son salarié des dommages et intérêts pour préjudice subi du fait du déficit de rémunération subi pendant plusieurs années ;

4°) ALORS subsidiairement QUE seul le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages-intérêts distincts des intérêts moratoires de la créance ; qu’en l’espèce, pour accorder au salarié une somme de 400 euros à titre de dommages et intérêts pour retard dans le paiement de sa rémunération, la Cour d’appel s’est bornée à affirmer « le déficit de rémunération subi pendant plusieurs années est à l’origine d’un préjudice » ; qu’en se déterminant par de tels motifs impropres à caractériser ni la mauvaise foi de l’employeur, ni l’existence pour le salarié d’un préjudice indépendant du retard apporté au paiement des sommes dues par l’employeur, la Cour d’appel a violé l’article 1153 alinéa 4 du Code civil.

Décision attaquée : Cour d’appel d’Orléans , du 26 juin 2012

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